Annex to Belgian historical emissions, NECP and 1.5°C scenarios

Que dit le GIEC à propos de la limitation à 1,5°C et quelles sont les implications pour les émissions mondiales, européennes et belges?

La Belgique a ratifié l’Accord de Paris entré en vigueur le 6 mai 2017 en ce qui concerne notre pays. Les parties signataires de l’Accord de Paris se sont engagées à « contenir l'élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et à poursuivre l'action menée pour limiter l'élévation de la température à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels, étant entendu que cela réduirait sensiblement
les risques et les effets des changements climatiques » (Accord de Paris - Article 2).

En fixant cet objectif de 1,5 °C, les parties ont également mandaté le GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat ) afin de rédiger un rapport spécial sur un réchauffement de 1,5 °C. Ce rapport a été publié en octobre 2018 et contient plusieurs analyses utiles donnant des indications des réductions d’émissions nécessaires afin de rester nettement en dessous de 1,5 °C d’élévation de la température (IPCC SR15, Tables 2.4 and 2.2, SPM C.1.3) :

  1. Dans les scénarios limitant l’élévation de la température sous 1,5°C sur l’ensemble du 21e siècle[1], les émissions globales nettes de gaz à effet de serre diminuent globalement de 55% entre 2010 et 2030. Dans les scénarios en dessous de 1,5°C en 2100 mais légèrement au-delà avant cette date, ces émissions sont globalement en baisse de 43% entre 2010 et 2030. Dans l’ensemble de ces scénarios, la planète atteint typiquement un taux d’émission de gaz à effet de serre « net nul » vers 2066. Ces valeurs sont basées sur les scénarios évalués jusqu’à présent par le GIEC. Elles représentent les réductions d’émissions observées dans ces scénarios sans pour autant que cela implique qu’il soit nécessaire d’employer des émissions de gaz à effet de serre cumulées en tant qu’objectif à long terme[2].
  2. Dans le cadre des scénarios sous -1,5°C,  les émissions de CO2 nettes mondiales diminuent globalement de 65% entre 2010 et 2030. La planète atteint le niveau zéro d’émissions de CO2 nettes vers 2044. Dans le cadre des scénarios sous 1,5°C en 2100 mais dépassant légèrement 1,5°C avant cette date, le pourcentage de réduction des émissions de CO2 entre 2010 et 2030 atteint environ 45%, tandis que la planète atteint le niveau zéro d’émissions de CO2 globales nettes vers 2050.
  3. Afin d’avoir deux chances sur trois de rester sous la limite de 1,5 °C, les émissions mondiales cumulées de CO2 à partir de 2018 ne doivent pas excéder entre 420 et 570 GtCO2[3].

Compte tenu du principe des responsabilités communes mais différentiées et des capacités respectives, conformément à l’Accord de Paris, les pays développés doivent réduire leurs émissions plus rapidement que ceux en développement.

En accord avec ces éléments, la Commission européenne a proposé un objectif zéro émissions nettes de gaz à effet de serre à l’horizon 2050 pour l’Europe. Il existe cependant une différence suffisamment documentée entre le puits « anthropique » tel que rapporté par les pays et celui rapporté par la communauté internationale de modélisation du carbone, dans les rapports du GIEC et, par conséquent, dans les valeurs ci-dessus. La raison ? Les rapports du GIEC ne prennent pas en compte « l’absorption naturelle du CO2 qui n’est pas causée directement par les activités humaines », comme indiqué dans l’encadré SPM.1 du SR15 tandis que dans leur rapport, les pays n’appliquent pas cette règle dans les zones classées comme « terres gérées », où l’ensemble des puits peuvent être compatibilisés (même s’ils ne sont pas directement liés aux activités humaines). Ainsi, une réduction jusqu’au « zéro net » selon les rapports nationaux (ou européen) équivaut à une certaine quantité positive d’émission sur la base des valeurs SR15 du GIEC. Nous devrons continuer à nous intéresser à ce sujet à l’avenir.

Parallèlement, afin d’atteindre la limite de 1,5 °C, la Belgique et l’Europe doivent viser un objectif zéro émissions nettes de CO2 vers 2040[4].

À titre d’illustration, le graphique 1 ci-dessous reflète une réduction linéaire des émissions de CO2 et d’autres gaz à effet de serre depuis les niveaux de 2018 à un niveau net zéro respectivement en 2040 et 2050.


[1] Trajectoires limitant le réchauffement maximal en dessous de 1,5°C durant tout le 21e siècle avec un pourcentage de probabilité entre 50 et 66%

[2] L’emploi d’émissions de gaz à effet de serre cumulées en tant qu’objectifs est un sujet distinct non traité dans ce cadre. La difficulté réside dans le fait que la réduction des émissions de gaz à courte durée de vie telles que le méthane n’entraîne pas un effet identique à celui de la réduction des émissions de longue durée de vie telles que le CO2. Certains scénarios compatibles avec la limite de 1,5°C n’atteignent pas le niveau zéro d’émissions de gaz à effet de serre agrégées avant 2100 en raison d’un pourcentage différent de réduction des émissions de courte et de longue durée au fil du temps (agir tôt au niveau des émissions de longue durée de vie diminue le besoin de réduire par la suite les émissions de courte durée de vie).

[3] Ces deux valeurs reflètent deux approches différentes de l’estimation de la température moyenne mondiale en surface, comme l’explique de manière détaillé le rapport du GIEC.

[4] Notre évaluation repose sur les informations actuellement disponibles. Le rapport SR15 du GIEC ne fournit pas d'information sur la réduction des émissions européennes (et belges) qui correspondraient aux scénarios d’émissions mondiales exposés